Page:Mémoires de l’Académie des sciences, Tome 12.djvu/247

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Pour de certains esprits, la conviction leur doit arriver par les yeux du corps et non sur des déductions conséquentes. Le caractère de l’individualité sera donc obstinément refusé aux quatre éléments de la pièce complexe de l’arrière-crâne chez les crocodiles.

L’un des Apôtres veut voir corporellement pour croire, et c’est de ce principe spécieux que part une certaine école pour refuser à la science les moyens de devenir science. Car c’est un parti pris de repousser les idées pour n’admettre exclusivement que des reliefs corporels’, seulement des faits que l’on puisse pratiquer matériellement, et par conséquent qui ne cessent jamais d’être palpables par nos sens. Pour cette école, la science du naturaliste doit se renfermer dans ces trois résultats : nommer, enregistrer et décrire.

Cette école, que de certains intérêts font momentanément prévaloir, enseigne que l’histoire des sciences apporte de toutes parts le témoignage que les théories se sont successivement précipitées dans le gouffre immense des erreurs humaines, que les idées ne sont rien en soi, et que les faits seuls se défendent des révolutions et surnagent. Cependant au lieu de livrer ainsi l’enfance de l’Humanité à la critique moqueuse de la Société actuelle, qui ne tient son plus d’instruction que de la puissance du temps et d’une civilisation progressive, ne vaudrait-il pas mieux expliquer ces vicissitudes naturelles autant que nécessaires, pour les voir selon l’ordre des siècles ? Et quant à cette affectation de présenter les faits comme constituant seuls le domaine de la science, il serait aussi, je crois, plus juste de dire qu’ils n’arrivent aux âges futurs, que s’ils sont escortés et protégés par les idées qui s’y rapportent et qui seules par conséquent en font la principale valeur.