Page:Mémoires de l’Académie des sciences, Tome 12.djvu/62

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cette alliance de la science et de la modestie qui caractérisait M. Vauquelin. Riche, considéré, entouré d’élèves dévoués, célèbre dans tous les pays où l’on cultive les sciences, il n’avait rien changé dans les habitudes de sa jeunesse. Chaque année il retournait à son village, où il possédait maintenant de grandes propriétés.

Il y renouvelait amitié avec les paysans qui avaient été ses camarades de jeux et de travail ; il y retrouvait surtout sa vieille mère, filant comme au temps où elle n’avait à elle que sa pauvre chaumière ; il la promenait dans la campagne, la conduisait avec lui dans ses visites, et ne se laissait point inviter sans elle, quels que fussent le rang et l’opulence de ceux qui l’invitaient.

À Paris, sa vie n’était guère moins simple ; il la partageait entre son laboratoire et quelques amis qui, encore, pour la plupart, étaient aussi ses compagnons de laboratoire : sa douceur, son beau regard, des idées fines et quelquefois plaisantes, mais toujours présentées avec réserve, donnaient à sa conversation un caractère tout particulier. Son langage était le même dans cet humble cercle et dans la société des personnages les plus élevés, et il ne faisait pas plus de façon avec le dominateur de l’Europe, qui voulait le voir quelquefois, qu’avec le moindre des pharmaciens qui suivaient ses cours.

Un jour que le premier consul avait reçu une lettre toute blanche, et que ses familiers en étaient effrayés, les uns supposant qu’il y avait quelque écriture en encre sympathique, d’autres allant même jusqu’à soupçonner une tentative criminelle, M. Vauquelin appelé, après avoir bien examiné le papier, se rappelant tout d’un coup la date du jour, s’écrie