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éloge de m. de beauvois.

Saint-Domingue. En attendant, il étudiait l’île avec soin, et la parcourait en tous sens avec ardeur. Nous savons, par un officier distingué qui l’accompagnait quelquefois, qu’il découvrit près du môle Saint-Nicolas une espèce nouvelle de sauge, dont on a dès-lors tiré un grand parti pour la médecine. Il ne perdait point pour cela de vue ses idées sur les fructifications des mousses, et nous voyons qu’il adressa de Saint-Domingue au rédacteur du Journal de Physique, des mémoires pour les reproduire et pour les défendre.

L’île de Saint-Domingue, bien qu’habitée depuis plus d’un siècle par des Français, était encore assez peu connue pour que M. de Beauvois eût pu y multiplier ses découvertes, et s’y rendre presque aussi utile à la science qu’il l’aurait été en Afrique, si les événements ne lui eussent promptement rendu toute recherche scientifique impossible. Ce n’était point dans des circonstances ordinaires qu’il y était arrivé. Déja en France tous les esprits excités par les discussions du ministère avec la magistrature aspiraient ouvertement vers un autre ordre de choses. L’annonce d’une prochaine convocation des états-généraux transforma en espérance ce qui n’avait été qu’en désir. Les affaires intérieures de la France n’étaient pas les seuls objets qui occupassent les hommes avides de nouveautés. Une société formée en Angleterre, qui s’était procuré en France des affiliés ardents, réclamait avec force l’abolition de la traite. Le bruit s’en était bien vite répandu à Saint-Domingue ; on y avait promptement appris que des amis des noirs tenaient un rang considérable parmi les hommes qui cherchaient à établir en France l’égalité civile et la liberté politique ; et aux yeux des colons, l’abolition de la traite ne pouvait manquer d’entraîner promptement