quée, il travaillait fréquemment en se promenant dans les couloirs de l’École. Pendant les récréations, il se joignait volontiers à la bande compacte de ses camarades de Nancy, s’accrochant au bras droit de l’un, au bras gauche de l’autre, poursuivant ses pensées sans presque parler, ni sans s’émouvoir des discussions qui, à cette époque de crise, devenaient quelquefois fort vives.
Son inaptitude pour les exercices physiques, maniement d’armes, gymnastique, était grande. Elle était particulièrement marquée pour le dessin et avait failli empêcher son entrée à l’École[1]. À la fin de l’année, ses camarades qui l’aimaient beaucoup et connaissaient son heureux caractère eurent l’idée d’organiser une exposition de ses œuvres. Les jeunes gens sont sans pitié comme les enfants. Sous une étude de cheval, ils avaient mis τουτο ιππος et sous une Académie τουτο ανηρ. J’aime à croire que ces indications étaient inutiles[2].
Cette faiblesse en dessin détermina son échec à l’examen final de Géométrie et de Stéréotomie. L’impossibilité de construire par points des droites à peu près convergentes, peut-être aussi des démonstrations de voyant qui l’amenaient au but sans considération intermédiaire, indisposèrent l’examinateur, M. de la Gournerie, et valurent à l’élève une note franchement mauvaise, qui lui fit perdre le premier rang. Le premier sorti de l’École fut Bonnefoi, qui devait être tué quelques années plus tard dans un accident de mine.
Poincaré entra à l’École des Mines en 1875. D’après ce que nous
- ↑ Le général Xardel nous rapporte, à ce sujet, un propos que l’examinateur Abel Transon, ami de sa famille, avait tenu après l’examen de Poincaré à Nancy :
« Nancy, disait M. Transon, présente un candidat bien remarquable. C’est Poincaré. Mais nous sommes bien embarrassés. Il a un zéro pour le dessin et le zéro est éliminatoire. Pour le reste il est absolument hors de pair. S’il est reçu, il sera premier ; mais sera-t-il reçu ? »
- ↑ Toutefois il finit par se perfectionner. J’ai vu des dessins de lui qui ne sont pas mal. Poincaré, qui devait être pour ses enfants l’éducateur le plus assidu, le plus éclairé, quittant tous ses travaux pour s’occuper de leur instruction, leur distribuait ces dessins à titre de récompense.