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Page:Mémoires de l’Académie des sciences, Tome 7.djvu/203

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de m. richard.

dres que ceux d’enfants qui n’auraient appris ces choses que pour elles-mêmes. À douze ans il savait les Géorgiques par cœur : la finesse et la pureté de ses dessins avaient quelque chose d’étonnant.

Mais ces talents précoces, qui auraient dû lui attacher ses parents, et lui procurer une jeunesse heureuse, furent précisément les causes des premières contrariétés qu’il éprouva, et qui peut-être, en altérant son humeur et sa santé, préparèrent celles du reste de sa vie. L’archevêque de Paris, M. de Beaumont, visitait quelquefois le jardin d’Auteuil, et en aimait le directeur. L’intelligence et l’instruction de cet enfant lui inspirèrent de l’intérêt, et il promit de l’avancer si on le vouait à l’église. C’était lui ouvrir la seule carrière où le talent sans naissance et sans fortune pût alors se promettre d’arriver aux honneurs et à l’aisance ; et c’était la lui ouvrir sous les auspices les plus favorables. Il n’était rien qu’il ne pût espérer des bontés du prélat secondées par la protection que le Roi accordait à sa famille ; et M. Richard le père, qui avait encore neuf autres enfants, et qui n’était pas riche, même pour un jardinier, ne pouvait manquer de saisir avec ardeur de pareilles espérances : mais son fils en avait décidé autrement. Rien ne put fléchir l’invincible résolution de cet enfant. Sans hésiter et sans varier il déclara qu’il serait botaniste ; qu’il serait jardinier, s’il le fallait, et rien de plus. Ni les prières, ni les menaces, n’eurent d’effet sur lui ; et le mécontentement de son père en vint au point qu’il le mit hors de sa maison ne lui accordant que dix francs par mois pour ses aliments.

Le jeune Richard n’avait pas alors tout-à-fait quatorze ans ; et combien d’enfants de cet âge une pareille disgrâce n’eût-