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Page:Mémoires de l’Académie des sciences, Tome 8.djvu/197

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ÉLOGE HISTORIQUE

seulement que naquit un art tout nouveau et d’un produit immense. Le chlore ne blanchit pas seulement avec plus de rapidité ; il donne un plus beau blanc ; exigeant moins des lessives, il ne fatigue pas tant les étoffes ; il rend à l’agriculture les grandes prairies sur lesquelles on étendait les toiles ; il s’applique à des toiles déjà peintes et qui ont mal réussi, ou qui ont passé de mode, aussi bien qu’à des toiles écrues, et, comme tous les agents énergiques, ce n’est pas aux toiles seulement que son pouvoir s’étend. M. de Born l’a employé à blanchir la cire. M. Chaptal s’en est servi pour rendre leur fraîcheur aux vieux livres, aux estampes enfumées ; il l’a mêlé à la pâte de chiffons, et a donné ainsi les moyens de faire du papier très-blanc avec les matériaux les plus communs. Aussi, en peu d’années, son emploi est-il devenu universel, et tellement populaire, qu’il a introduit de nouveaux mots dans le langage usuel. Personne n’ignore aujourd’hui ce que c’est qu’une blanchisserie berthollienne. On dit même dans les ateliers, bertholler, berthollage : on y entretient des ouvriers que l’on y appelle des bertholleurs. Rien ne met plus authentiquement le sceau au mérite d’une découverte.

C’est la seule récompense qu’en ait tirée l’auteur, et il n’en désira point d’autre. Toujours étranger à ce qui n’était pas la science elle-même, il ne prit pas seulement d’intérêt dans ces fabriques élevées sur sa découverte. Les Anglais qui la mirent les premiers en usage, voulaient lui marquer leur reconnaissance par dé beaux présents. Tout ce qu’il accepta fut un morceau de toile blanchi par son procédé.

En étudiant sous toutes ses faces cet agent singulier du blanchîment, ce chlore, cet acide muriatique déphlogistiqué ou oxigéné, M. Berthollet fit encore une découverte bien