Page:Mémoires de la Société des lettres, sciences et arts de l'Aveyron, tome 11.djvu/400

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prière, à la paix de l’âme et à son union avec Dieu. L’évêque Adhemar procéda à la bénédiction du monastère et à la consécration du terrain sur lequel devait s’élever l’église ; il planta à cet endroit une croix de bois pour indiquer qu’il avait marqué ce lieu comme ne pouvant recevoir à l’avenir une destination profane. L’église de Loc-Dieu ne fut commencée qu’en 1159 (environ 15 ans après cette cérémonie). Autrefois, disent les anciens rituels, c’était l’usage de planter une croix à l’endroit où l’on voulait bâtir une église. Cette cérémonie avait été ordonnée par le concile d’Orléans. Nous trouvons cette prescription rapportée dans un canon d’Yves de Chartres : « Nemo ecclesiam ædificet, antequam civitatis episcopus veniat, et ibi crucem figat publice, et ib atrium designet. » Charlémagne recommande aussi cette pratique et il dit : « Si quis ædificare voluerit ecclesiam, prius episcopus... locum consecret Deo, figens in eo salutis nostrum signum. »

Jusques-là, quoique vouée à Notre-Dame, cette abbaye ne portait aucun nom particulier.

Ayant appris qu’avant l’arrivée des moines ce lieu était connu dans la contrée sous le nom de locus, ou lucus, ou lacus diaboli, l’évêque décida que le monastère porterait le nom de locus Dei ou de Loc-Dieu (lieu de Dieu), cet endroit étant désormais acquis à Dieu par la présence du monastère sanctifié par la prière et la pénitence. Ce qui explique l’inscription suivante placée au XVIIe siècle au-dessus de la porte d’entrée, alors que dom Claude Fleury était abbé commandataire :

Quod olim fuerat locus diaboli
Nunc est locus Dei.

L’évêque Adhemar III rentra à Rodez vers la fin du mois de janvier 1844. Soit à cause de son grand âge, soit à cause des fatigues qu’il avait endurées pendant ce pénible voyage dans la saison d’hiver, le vénérable évêque tomba malade et mourut cette même année, en laissant le souvenir d’une bonne et pieuse mémoire : Vir bonæ et piæ memoriæ. Dans un acte de fondation de l’abbaye de Sylvanès, en indiquant l’année de la mort de cet illustre prélat,