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calendes de décembre 1177 les religieux élurent un simple moine nommé Arbert.

Le nouvel abbé reçut le monastère grevé de dettes. Car ainsi que nous l'avons déjà vu, pour bâtir l'église, les abbés de Loc-Dieu avaient été contraints de recourir aux banquiers de l'époque, c'est-à-dire aux usuriers dont la plupart étaient des juifs. L'intérêt de l'argent était alors plus élevé qu'il ne l'est aujourd'hui. Au taux de 5% il faut vingt ans au débiteur pour débourser, sous forme d'intérêt, une somme égale au capital reçu sans compter l'intérêt de l'intérêt. Les ordonnances de Philippe-Auguste (Ord. XI, 291) fixent à deux deniers par semaine l'intérêt à payer pour une livre tournois. En exigeant légalement deux deniers par livre tournois cela reviendrait aujourd'hui à un revenu de 43 fr. 75 c. pour 100 fr., de sorte que, au bout seulement de deux ans cumulés avec l'intérêt des intérêts, le monastère de Loc-Dieu devait une seconde fois le capital emprunté.

On comprendra facilement la situation désespérée dans laquelle devait se trouver le monastère, car non seulement la fortune immobilière de Loc-Dieu, mais encore la fortune privée de quelques seigneurs signataires de l'emprunt était à la veille d'être la proie des usuriers. Les constitutions de Cîteaux faisaient un devoir de charité aux abbayes opulentes d'aller au secours de celles de leur filiation qui se trouvaient dans la gêne. Dalone qui était unie à Loc-Dieu s'en sépara, n'étant pas assez riche pour la sauver de la ruine. Pontigny affilié aussi à Loc-Dieu, mais moins au courant de la situation, lui resta encore uni. Pontigny, ayant enfin compris que Loc-Dieu était chargé de dettes trop considérables pour qu'il lui fut possible de les payer, s'en sépara après bien des hésitations. Cependant l'abbé de Pontigny désirant ne pas abandonner Loc-Dieu entièrement usa de toute son influence et employa tous ses efforts pour l'unir à Bonneval qui était alors très riche.

L'abbaye de Bonneval, située dans le diocèse de Rodez, fut fondée en 1147 par Guillaume de Calmont-d'Olt, évêque de Cahors, qui la dota très richement. Bientôt,