Page:Mémoires de la comtesse de Boigne Tome III 1922.djvu/180

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
176
MÉMOIRES DE MADAME DE BOIGNE

— Allons donc, mon ami, vous vous moquez de moi, qu’est-ce qu’une création de pairs peut faire à vos marchands de gadoue ? Ayez une bonne élection. C’est toujours la faute de l’administration quand elles sont mauvaises, souvenez-vous-en ! »

Le sous-préfet haussa les épaules, quand le ministre se fut éloigné, et acheva lentement de monter le degré, comme un homme très peu persuadé par l’éloquence élégante de son principal.

Beaucoup d’électeurs partagèrent les préventions de ceux de Saint-Denis et, stimulés, excités par le zèle des comités que j’ai signalés, nommèrent un assez grand nombre de députés hostiles au ministère pour que la majorité fût au moins douteuse.

Dans la disposition assez naturelle de rejeter sur d’autres le tort des actions qui tournent à mal, monsieur de Villèle ne put se retenir d’accuser la Congrégation et d’en témoigner beaucoup d’humeur contre elle. Il chercha à se rallier le petit noyau d’ultras aristocratiques qui était resté en dehors de la ligue jésuitique, mais il fut repoussé.

Il se retourna alors vers les royalistes constitutionnels qui, depuis trois ans, dirigeaient la conduite de la Chambre des pairs, mais ils étaient trop irrités par la mesure qui venait de frapper cette assemblée pour se rallier à celui qui l’avait signée.

Ces démarches du président du conseil ne purent être assez secrètes pour que la Congrégation n’en eût pas connaissance, et sa perte fut jurée. On fit venir monsieur de Polignac d’Angleterre, et le duc de Rivière acheva de décider le Roi au renvoi de monsieur de Villèle. Ces messieurs ne doutaient pas que le moment de leur triomphe ne fût arrivé.

Toutefois, monsieur de Villèle qui redoutait le crédit