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MÉMOIRES DE MADAME DE BOIGNE

semblaient indiquer ces paroles, répondit chaudement que le duc de Wellington était ministre anglais, qu’il ne devait voir les affaires que sous le point de vue anglais, et que c’est au conseil du roi de France, composé de français, de peser les propositions et de décider si elles étaient dans l’intérêt de la France, sans s’arrêter aux affections personnelles qui, certainement, n’influençaient en rien le cabinet britannique. Il pulvérisa les arguments du duc dont monsieur de Polignac s’était rendu l’organe, ramena le Roi à son opinion et emporta la question malgré monsieur le Dauphin.

Cette discussion eut lieu à la fin de l’année. Mais d’autres circonstances avaient déjà aigri l’esprit du prince. Une des premières fut ce qui se passa pour le remplacement du duc de Rivière. Le Roi voulait que la place de gouverneur fût uniquement à sa nomination. Le conseil demanda à être consulté. La prétention du Roi fut appuyée par les ultras, celle des ministres par le pays tout entier.

Monsieur le Dauphin prit vivement parti pour son père. Il n’admettait pas qu’il ne pût exercer, dans le choix du gouverneur de son petit-fils, l’indépendance acquise de droit à tout chef de famille. Avec son peu de grâce accoutumée, il dit qu’on ne pouvait la lui refuser sans insolence.

Les ministres insistèrent cependant, et le Roi s’engagea à ne faire aucun choix sans qu’ils en fussent informés. Ils se mirent en quête de trouver une personne convenable. Le duc de Mortemart fut tâté. Mais, tandis qu’on négociait avec lui, le Roi fit prévenir ses ministres individuellement, à dix heures du soir, que la nomination du baron de Damas paraîtrait le lendemain au Moniteur.

C’était là ce qu’il appelait ne point faire un choix sans les en informer. Ils avaient compris différemment ses