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MÉMOIRES DE MADAME DE BOIGNE

ment d’accord entr’eux sur la manière d’agir. Bientôt, les premiers l’emportèrent, et on trouva que monsieur de La Bourdonnaye n’entrait pas suffisamment dans les vues du parti prêtre. Lui-même fut effrayé des folies qu’on méditait, et l’élévation de Jules de Polignac à la présidence du conseil lui servit de prétexte pour solliciter une retraite qu’on était fort disposé à lui accorder.

Enfin, pour achever la série des noms odieux au pays et compléter sa colère, ce fut monsieur de Peyronnet qui le remplaça au ministère de l’intérieur.

Une femme, très liée avec monsieur de La Bourdonnaye, lui ayant reproché d’avoir abandonné les affaires pour la puérile susceptibilité du nouveau titre donné à Jules dans un moment si critique, il lui répondit que cette inculpation était tout à fait erronée, que, si le conseil avait marché dans ses vues, il y serait resté quelqu’eût été son président : « Mais, voyez-vous, avait-il ajouté, quand on joue sa tête il faut tenir les cartes. »

Ce propos, dont je suis bien sûre, confirme les révélations de monsieur Courvoisier. Il montre à quel point les ordonnances étaient préméditées, et combien leur résultat probable était prévu pour tous ceux que Dieu, dans sa colère, n’avait pas frappé d’une irrémédiable cécité.

Il me faut donner une nouvelle preuve de cet aveuglement royal auquel les personnes qui n’auront pas vécu dans notre temps auront peine à croire et qui n’en est pas moins d’une scrupuleuse exactitude.

Monsieur de Bourmont, après s’être battu bravement dans la Vendée, avait fait sa paix particulière avec l’Empereur, abandonné, d’autres disent livré, ses camarades, et pris du service dans l’armée Impériale si promptement qu’il n’en était guère estimé.

En 1814, il s’était trouvé des plus empressés à saluer