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Page:Mémoires de la comtesse de Boigne Tome III 1922.djvu/240

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MÉMOIRES DE MADAME DE BOIGNE

de bon accord, nos deux princesses françaises se partageaient l’accueil à faire à leurs parents.

Il y eut spectacle à la Cour ; et, pour la première fois, nous vîmes la famille d’Orléans paraître dans la loge royale. Le Roi avait témoigné la veille de la représentation un demi regret que cette loge ne fût pas assez grande pour les y admettre avec les voyageurs, leurs si proches parents.

Monsieur de Glandevès, gouverneur des Tuileries, recueillit ces paroles, fit travailler toute la nuit et le lendemain prévint le Roi que la loge pouvait contenir les princes d’Orléans. Le Roi resta un moment étonné, puis il prit son parti de bonne grâce.

La joie en fut des plus vives au Palais-Royal, et la reconnaissance pour monsieur de Glandevès si sincère que j’en ai constamment retrouvé les traces, même après que les journées de Juillet eurent changé tous les rapports.

Madame la duchesse de Berry donna, dans ses appartements et ceux de ses enfants aux Tuileries, un magnifique bal. Je n’en ai jamais vu de mieux ordonné. Le local forçait à occuper deux étages ; mais un escalier, qui n’était pas celui par lequel on arrivait, avait été élégamment décoré ; les paliers en étaient transformés en salons confortables, et, les quelques marches qui les séparaient les uns des autres se trouvaient tellement dissimulées sous les tapis et les fleurs que cet escalier fut autant occupé qu’aucune autre pièce et semblait faire partie des appartements.

Malgré la recherche, l’élégance de ce bal où la bonne compagnie se trouvait réunie en nombre immense sans qu’il y eût cohue, malgré la bonne ordonnance et l’air satisfait de la maîtresse de la maison, il régnait dans tous les esprits un instinct d’alarme qui arrêtait la gaîté.