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RIDICULES DE M. DE VAUBLANC

cadeau, ajoutait l’Empereur, lui paraissait le seul digne de son noble caractère et celui que, sans doute, il apprécierait le plus haut. Un tel don honore également le souverain qui en conçoit la pensée et le ministre qui mérite de l’inspirer.

Malgré ce succès que monsieur de Richelieu n’était pas homme à proclamer et qui n’a été su que longtemps après, son cœur vraiment français saignait de ce terrible traité. Le son de voix avec lequel il en fit lecture à la Chambre, le geste avec lequel il jeta le papier sur la tribune après ce pénible devoir accompli sont devenus historiques et ont commencé à réconcilier tout ce qui avait de l’âme dans le pays à un choix qui d’abord apparaissait comme un peu trop russe.

Rien au monde n’était plus injuste ; monsieur de Richelieu était français, exclusivement français, nullement émigré et point du tout plus aristocrate que les circonstances ne le permettaient. Il était, dans le meilleur sens des deux termes, libéral et patriote. Pendant ce premier ministère, il éprouvait l’inconvénient de ne point connaître les personnes et, pour un ministre prépondérant, cela est tout aussi nécessaire que de savoir les affaires. Cette ignorance lui fit accepter sans opposition, un collègue donné par Monsieur. C’était monsieur de Vaublanc. Il ne tarda pas à déployer une sottise si délicieusement ridicule qu’il aurait fallu en pâmer de rire s’il n’avait pas trouvé de l’appui chez les princes et dans la Chambre. Toutes les absurdités étaient contagieuses dans ces parages.

Monsieur de Vaublanc chercha promptement à fomenter une intrigue contre monsieur de Richelieu ; elle fut déjouée par le crédit des étrangers.

Ce fut vers ce temps que Monsieur donna à monsieur de Vaublanc un grand cheval blanc. Il posait dessus, dans