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CHAPITRE x


Faveur de monsieur Decazes. — Son genre de flatterie. — Affaires de Lyon. — Le duc de Raguse apaise les esprits. — Discours de monsieur Laffitte. — Monsieur le duc d’Orléans revient à Paris. — Histoire inventée sur ma mère. — Ma colère. — Arrivée de toute la famille d’Orléans. — Déjeuner au Palais-Royal. — Calomnies absurdes.

Le favoritisme de monsieur Decazes se trouva mieux établi que jamais. Le Roi ne voyait que par ses yeux, n’entendait que par ses oreilles, n’agissait que par sa volonté.

Les souverains ne se gouvernent guère que par la flatterie. Louis XVIII était trop accoutumé à celles des courtisans d’origine pour y prendre grand goût ; il en avait besoin pour lui servir d’atmosphère et y respirer à l’aise, mais elles ne suffisaient pas à son imagination.

Sa fantaisie était d’être aimé pour lui-même ; c’était le moyen employé par tous les favoris précédents, excepté par madame de Balbi, je crois, qui se contentait de se laisser adorer et ne se piquait que d’être aimable et d’amuser, sans feindre un grand sentiment.

Monsieur Decazes inventa un nouveau moyen de soutenir sa faveur ; il se représenta comme l’ouvrage du Roi, non seulement socialement mais politiquement. Il feignit d’être son élève bien plus que son ministre. Il passait des heures à se faire endoctriner par lui. Il apprenait, sous son royal professeur, les langues anciennes aussi