Aller au contenu

Page:Mémoires de la comtesse de Boigne Tome IV 1922.djvu/176

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
171
EXPÉDITION DE LA DUCHESSE DE BERRY

« Général, je ne dois pas être insultée… cela vous regarde.

— Soyez tranquille, Madame.

— Je me fie à vous. »

La route était bordée d’une haie de soldats. Elle la franchit d’un pied et d’un cœur fermes, causant avec son escorte militaire, d’une grande liberté d’esprit, mais refusant toute réponse au préfet qui était survenu au moment de son départ.

Parvenue au château, elle donna des ordres sur les soins à rendre à ses compagnons d’infortune, principalement à monsieur de Mesnard qui paraissait fort mal, avec une sorte d’autorité, puis elle demanda à se reposer. Conduite dans sa chambre avec mademoiselle de Kersabiec, elle en ressortit un instant après, sous le prétexte de recommander que le médecin, appelé auprès du comte de Mesnard, vint lui faire son rapport.

L’homme de la police, accoutumé à observer tous les gestes, s’aperçut qu’une très petite boule de papier avait passé de la main de la princesse dans celle de l’avocat Guibourg. Le désir de s’en emparer suggéra la pensée de fouiller les prisonniers aussitôt que Marie-Caroline se fut éloignée.

Le papier, trouvé sur monsieur Guibourg, contenait ces mots écrits au crayon : « Insistez, surtout, pour n’être pas séparé de moi. »

Cette circonstance, sue dans le temps et infidèlement racontée, accrédita le bruit, déjà répandu, d’une intrigue amoureuse entre la princesse et l’avocat. Je n’oserais garantir qu’il n’en fût rien.

Mais monsieur Guibourg était en fuite, avec une condamnation capitale sur le corps. Madame la duchesse de Berry se croyait une sauvegarde pour ses entours et cette pensée suffisait à expliquer les termes du billet.