Aller au contenu

Page:Mémoires de la comtesse de Boigne Tome IV 1922.djvu/186

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
181
EXPÉDITION DE LA DUCHESSE DE BERRY

fournirent. Toutefois, le petit sanhédrin des dames du faubourg Saint-Germain firent d’amples lamentations sur ce que madame la duchesse de Berry avait été enlevée sans aucune espèce de bagage, et s’offrirent à lui procurer par souscription un trousseau.

Madame de Chastellux fut députée vers moi pour me charger de solliciter de monsieur Thiers l’autorisation de cet envoi. J’eus la satisfaction de pouvoir répondre que tout avait été prévu à ce sujet. Il ne manquait rien à l’illustre prisonnière, et je le savais mieux que personne, y ayant été employée.

Mais cela ne suffisait pas à un parti accoutumé à se repaître de niaiseries. Les patronnesses voulaient une souscription ayant un certain retentissement. On décida que la princesse ne devait pas porter des vêtements fournis par ses persécuteurs ; et je consentis à demander l’entrée à Blaye de ceux qu’on y voulait expédier.

Je l’obtins à grand’peine, et, pendant trois semaines, les salons légitimistes furent exclusivement occupés de cet envoi. Chacun ajoutait un petit symbole de zèle ingénieux et de dévouement spirituel à son offrande. Mais tout cela prenait un certain temps pendant lequel la recluse était forcée à porter ces chemises de Nessus si redoutées pour elle.

Ajoutons, en passant, que la princesse ne partageait apparemment pas les scrupules de ces personnes dévouées ; car, en quittant Blaye, elle a emporté non seulement les effets destinés à sa personne, mais encore les meubles les plus élégants de son appartement, disant qu’elle n’en trouverait pas d’aussi bien fabriqués à Palerme.

L’offrande des dames du faubourg Saint-Germain, on doit le comprendre, fut soumise à un rigoureux examen. Un livre de prières, par la largeur de ses marges, je