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MÉMOIRES DE MADAME DE BOIGNE

« Ce qui préoccupait le plus les palermitiens, c’était de savoir comment le jeune Hector s’en tirerait avec la vieille princesse de Partano, à laquelle il a fait plusieurs enfants à Madrid lorsqu’il y était secrétaire d’ambassade avec le prince du même nom.

« Cette femme est très jalouse ; on présume qu’elle fera quelques scènes à la duchesse de Berry qui lui enlève celui de ses amants qu’elle aime le mieux. Du reste, toute cette affaire occupe peu à Palerme.

« Tout le monde se prépare pour les fêtes dispendieuses qui auront lieu du 11 au 15 juillet en l’honneur de sainte Rosalie, patronne de la Sicile, et personne ne met en doute que l’héroïne de Nantes n’y prenne une part fort active.

« Dès que l’Agathe parut, je me rendis à bord. J’y ai passé toute la journée et, n’ayant qu’à attendre les ordres de Turpin, il m’a été facile d’observer le rôle que chacun a joué dans cette journée historique. En arrivant, j’ai été présenté à la duchesse par Turpin ; elle a été fort aimable, gaie et même empressée.

« Je lui ai fait mes offres pour la France, ainsi qu’aux personnes fidèles qui l’entouraient. Sa santé est parfaite ; elle m’a dit que le mal de mer l’avait d’abord éprouvée, mais qu’aujourd’hui elle se portait mieux que jamais.

« Pendant la journée, elle m’a adressé plusieurs fois la parole et avec un enjouement, une liberté d’esprit qui m’ont étonné dans la circonstance. Pendant le voyage, elle s’est attachée à se faire aimer de la marine et a montré de l’éloignement pour le général Bugeaud qu’elle nomme son geôlier.

« Je me suis aperçu que ce dernier, brave et franc militaire, n’avait pas mis les formes douces et polies que les officiers et le capitaine de l’Agathe emploient dans toutes leurs relations avec les déportés. Il est vrai de dire que