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Page:Mémoires de la comtesse de Boigne Tome IV 1922.djvu/220

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EXPÉDITION DE LA DUCHESSE DE BERRY

tenais à m’assurer qu’il ne s’occupait pas de la petite fille. En faisant observer cette circonstance au général Bugeaud, nous nous rappelions qu’elle dit en accouchant : « Que le bon Lucchesi sera content, lui qui désirait tant une fille ! »

« Le prince Rodolphe, frère de la duchesse, lieutenant général de la Sicile, ne vint pas à bord la voir ; il envoya le commandant de la marine Almagro pour la complimenter et l’accompagner à terre.

« L’Agathe était entourée d’au moins cent cinquante canots et bateaux contenant des curieux, des musiciens qui tous parlaient, criaient, chantaient et jouaient des instruments ; le tout faisait un vacarme tel qu’on ne s’entendait pas à bord de la corvette.

« Je ne vous ai encore rien dit de monsieur Deneux, le fidèle accoucheur, que la duchesse accablait de préférences, d’attentions à Blaye et qu’à bord elle n’a plus regardé. Le jour du débarquement, elle ne l’a pas engagé à venir la voir à terre, non plus que monsieur Mesnière, le jeune médecin. Ces deux messieurs en ont été fort blessés, d’autant plus qu’elle a fait toutes ses grâces aux autres, et pourtant elle leur a quelque obligation.

« Quand le général Bugeaud a été lui faire ses adieux, elle n’a pu s’empêcher de lui dire qu’elle estimait son caractère et qu’elle reconnaissait qu’il avait rempli sa tâche difficile avec modération et franchise.

« Enfin, vers quatre heures et demie, elle s’est embarquée dans le canot de Turpin qui lui donnait le bras. Les officiers rangés en haie l’ont saluée de l’épée ; puis vingt et un coups de canon lui ont été tirés en hissant les pavois. Dans le premier canot se trouvaient, dans l’ordre suivant de leur embarquement : 1o la duchesse, monsieur et madame de Bauffremont, monsieur de Mesnard, et monsieur Lucchesi ; remarquez que le mari a passé le