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MÉMOIRES DE MADAME DE BOIGNE

dernier et que la petite fille est restée pour le canot des domestiques.

« Cette petite m’intéressait toujours ; l’abandon dans lequel la laissaient sa mère véritable et son père supposé m’occupait beaucoup, et je faisais des questions insidieuses aux acteurs principaux pour en conclure quelque chose. Mes soupçons se portent sur Deutz et monsieur Guibourg l’avocat ; c’est aussi l’avis du général Bugeaud.

« Toute la population de Palerme était sur les quais. Aussitôt qu’elle a été à terre, un canot est venu porter au général Bugeaud une lettre du prince Campoforte, premier ministre, père de Lucchesi, par laquelle il reconnaissait que madame la duchesse de Berry et sa fille avaient été débarquées à Palerme en parfaite santé.

« Ainsi finit cette affaire qui dure depuis quatorze mois et qui a irrité les esprits, qui est peu connue des masses en raison des récits et conjectures contradictoires qui ont été débités à dessein et accrédités par les ayants-cause afin de cacher la vérité qui n’est plus obscure pour moi.

« La duchesse de Berry conserve toujours dans ses propos un espoir de retour en France avec lequel elle récompense ceux qui lui témoignent de l’intérêt. Elle a donné vingt jours de solde à l’équipage de l’Agathe, ce qui fait environ deux mille cinq cents francs. Elle a été fort gracieuse avec les officiers quand ils ont pris congé d’elle.

« Elle a dit et fait dire que, plus tard, quand elle serait en France, elle récompenserait dignement l’état-major et l’équipage de la corvette. Dans tout ceci, elle s’est montrée reconnaissante, car il n’est pas possible de mieux faire les choses que Turpin ; il a su y mettre les égards et les attentions que mérite le malheur, tout en conservant les convenances de sa position.