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MÉMOIRES DE MADAME DE BOIGNE

À peine rentrée au salon, la Reine congédia madame la duchesse d’Orléans dont la pâleur constatait la fatigue ; elle l’embrassa en lui disant bonsoir.

Je fus extrêmement frappée, dans ce moment, de la grâce inimitable de tendresse affectueuse, filiale, respectueuse avec laquelle notre nouvelle princesse baisa la main de la grande-duchesse sa belle-mère. Il y avait toute l’éloquence de longs discours de reconnaissance et de bonheur dans son maintien.

Ce fut le dernier aperçu que j’eus de madame la duchesse d’Orléans dans ces circonstances, et j’en remportai un souvenir que je conserve encore très vif.

Le Roi s’était retiré ; le couple belge ainsi que les jeunes princesses suivirent son exemple. La Reine et madame Adélaïde, dont le zèle l’emporte toujours sur la fatigue, se chargèrent seules de faire leur métier en conscience et employèrent encore quelques minutes en politesses et surtout en adieux aux personnes qui, comme moi, prenaient congé.

La grande-duchesse ne les abandonna pas dans cette dernière corvée de la journée. Elle avait gagné tous les suffrages par la convenance de son maintien. Elle paraissait aimer maternellement notre princesse, ne parlait que les larmes aux yeux de la pensée de s’en séparer, mais ne répondait que par les refus les plus formels aux demandes de prolonger son séjour.

Elle ne comptait rester que peu de jours ; et il fallut que la sincérité des prières qu’on lui adressait s’établit bien clairement dans sa pensée pour qu’elle se décidât à accorder quelques semaines. La belle-mère montra tant de bon esprit dans ces conjonctures délicates que les espérances déjà conçues de la princesse élevée par elle en furent très encouragées.

J’étais arrivée à Fontainebleau le mercredi. Je le