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Page:Mémoires de la comtesse de Boigne Tome IV 1922.djvu/292

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MORT DE LA DUCHESSE DE WURTEMBERG

« Je savais, répondit-elle, que jamais Louise ne consentirait à se marier si elle pouvait deviner la centième partie du chagrin que j’éprouve. J’avais promis à maman de ne pas l’en dissuader ; car je pense, comme elle, que le mariage est non seulement dans les convenances, mais dans le devoir des femmes, et qu’on manque à Dieu en cherchant à s’y soustraire. »

La princesse Marie a été fidèle à ce système, car, non seulement elle n’a formé objection à aucun des mariages dont on a eu l’idée pour elle, mais elle les a tous successivement fort désirés.

Son cœur malade demanda alors du secours à son imagination. Elle se lia plus étroitement avec mademoiselle Antonine de Celles, et toutes deux se jetèrent dans une dévotion extatique qui marchait droit à l’illuminisme. Sa gouvernante, madame Mallet, s’en alarma et avertit la Reine dont la sage piété n’admettait pas ces aberrations. Elle retint la princesse Marie auprès d’elle plus constamment et profita du mariage de mademoiselle de Celles avec monsieur de Caumont pour l’éloigner de l’intimité de sa fille.

Je crois que madame Mallet commençait à s’inquiéter de l’avenir de la jeune princesse ; elle l’aimait d’une extrême passion. Avec un grand fonds d’instruction, madame Mallet avait peu d’esprit. Le cœur et le dévouement lui en tenaient lieu, et ses deux augustes élèves ne pouvaient tomber en meilleures mains pour en faire des personnes également vertueuses et distinguées.

Mais il aurait fallu une véritable supériorité pour être en état de défendre la princesse Marie d’elle-même ; et madame Mallet, encore affaiblie par un état maladif, n’était pas capable de cette tâche. Dès longtemps, elle était sous la domination absolue de son élève, qu’elle adorait, et plus propre à se laisser séduire par elle et à