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Page:Mémoires de la comtesse de Boigne Tome IV 1922.djvu/305

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MÉMOIRES DE MADAME DE BOIGNE

Il aurait préféré que la princesse Marie restât fille, et s’en était expliqué avec elle, en lui témoignant le désir de renouveler entre eux le tendre exemple d’amitié fraternelle que le Roi et Madame Adélaïde leur montraient à chaque heure.

J’ai même lieu de croire qu’il alla jusqu’à lui représenter combien le prince, auquel elle allait se donner, lui semblait peu capable d’apprécier son mérite. Ce qu’il y a de sûr, c’est que la princesse fut très blessée de la démarche de son frère et qu’il en est toujours resté un refroidissement sensible entre eux.

La dame allemande qui devait accompagner la princesse se trouva trop malade pour partir. Les deux jeunes époux en gardèrent le silence. La Reine apprit le soir que, dans sa fièvre d’indépendance, la princesse courait les grandes routes, tête à tête avec cet époux de quatre jours.

Le télégraphe leur porta l’ordre de s’arrêter, et la duchesse de Massa, dame d’honneur des princesses de France, fut expédiée en toute hâte pour les rejoindre et accompagner la duchesse de Wurtemberg jusqu’à la résidence de sa nouvelle famille.

Elle en témoigna bien un peu de contrariété mais son entrée en Allemagne en eut plus de convenance. Elle fut parfaitement accueillie par la duchesse de Cobourg, sœur du duc Alexandre, près de laquelle il avait élu domicile.

La princesse Marie, si ennuyée des exigences de son rang à Paris, se soumit merveilleusement à l’étiquette étroite des petites Cours allemandes qu’elle visita successivement pour faire connaissance avec les parents de son mari.

Mais l’amour est un grand fard et sa passion était devenue tellement vive qu’elle mandait un jour à la Reine sa mère qu’on ne pouvait imaginer rien de plus délicieux que de faire quinze lieues en traîneau, sur six pieds de