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MÉMOIRES DE MADAME DE BOIGNE

s’en servir plutôt que de retourner à pied. Elle y consentit, et nous y montâmes.

Elle me dit avoir été contente de monsieur Pasquier : « On voit, ajouta-t-elle, que c’est un homme accoutumé à envisager les questions sous toutes les faces, et, pour vaincre les obstacles, c’est un grand moyen de les avoir prévus ; mais on voit aussi qu’il est peu pressé de s’engager. Évidemment, il s’est trouvé dans bien des révolutions et il les redoute. Mais, de qui j’ai été enchantée, c’est de notre bon Pozzo. Il est parfait, ma chère madame de Boigne, parfait ; c’est tout à fait un de nous. Il m’a raconté cette dépêche qu’il a été signer ; nous ne l’aurions pas faite autrement ! Il me tarde fort qu’il puisse voir mon frère. J’espère arranger cela pour la nuit prochaine. Au reste, le plus essentiel est déjà accompli : la décision qu’il a fait prendre au corps diplomatique de rester à Paris, et l’expédition de ces bonnes dépêches. »

Nous devisâmes sur ce sujet, et sur plusieurs autres, pendant la route. Elle n’offrit d’autre inconvénient que de nombreux et affreux cahots. Je fis arrêter dans la rue de Valois ; j’accompagnai Mademoiselle par l’escalier de la tourelle, et, une fois que j’eus vu la porte de son appartement fermée sur elle, je regagnai mon fiacre et revins chez moi.

Après avoir fait semblant de dîner, car l’excessive chaleur, la fatigue, l’agitation empêchaient de manger presqu’autant que de dormir, je remontai dans un fiacre pour aller voir madame Récamier. Elle m’attendait, avec impatience, pour m’entretenir de monsieur de Chateaubriand.

Je découvris bientôt qu’il était outré contre Charles x qui n’avait pas répondu à sa lettre, indigné contre les pairs qui ne l’avaient pas choisi pour diriger la Chambre, furieux contre le Lieutenant général, qui n’avait pas