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Page:Mémoires de la comtesse de Boigne Tome I 1921.djvu/201

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CHAPITRE ii


Mes opinions. — La duchesse de Châtillon. — La duchesse de Laval, le duc de Laval. — La famille de Rohan. — La princesse Berthe de Rohan. — La princesse Charles de Rochefort. — La princesse Herminie de Rohan. — Scène pénible. — Mon premier bal à Paris. — L’amiral de Bruix, sa mort. — Paroles de l’Empereur. — La princesse Serge Galitzin. — La duchesse de Sagan. — Monsieur de Caulaincourt. — Scène entre la princesse de la Trémoille et monsieur d’Aubusson. – La duchesse de Chevreuse.

Je ne voulus pas assister aux fêtes du couronnement ; mon héroïsme royaliste en aurait trop souffert. Nous nous amusions dans notre oisive nullité par mille brocards. Un seul était assez piquant ; on disait que le manteau impérial restait flottant parce que l’Empereur n’avait pas su passer la Manche. En dépit de mes préjugés, je n’avais pu me défendre d’une exaltation très sincère pour le Premier Consul. J’admirais en lui le conquérant et le faiseur de bulletins. Personne ne m’avait expliqué son immense mérite de législateur et de tranquilliseur des passions ; je n’étais pas en état de l’apprécier à moi seule. Je me serais, je crois, volontiers enthousiasmée pour lui si j’avais vécu dans une autre atmosphère.

À Londres, ma pauvre mère avait souvent pleuré de chagrin en me voyant si mal penser ; elle prétendait que je montais la tête de mon frère pour Bonaparte. Il est certain que, voyant nos princes de près et le Premier Consul de loin, tous mes vœux étaient pour lui ; la mort du duc d’Enghien avait été une impression aussi fugitive