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Page:Mémoires de la comtesse de Boigne Tome I 1921.djvu/330

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ERREURS DU MARÉCHAL MARMONT

il était salué du nom de Monk ; on lui affirmait, en outre, que la résolution de ne transiger d’aucune sorte avec l’Empire était prise dès le premier jour, que la proclamation du 30 en faisait foi, que la démarche des maréchaux ne pouvait donc avoir de succès. Lui, d’une autre part, se disait que ses généraux n’avaient fait qu’exécuter ce qu’il leur avait proposé dans des circonstances restées les mêmes, puisque la Régence avait été refusée, qu’ainsi il serait peu généreux de les désavouer, etc. Enfin, à force de raisons, bonnes ou mauvaises, il en vint à se persuader qu’il devait assumer la responsabilité sur sa tête.

La convention avec le prince de Schwarzenberg fut rédigée le lendemain matin, signée, antidatée et envoyée au Moniteur. Non content de cela, le maréchal reçut une députation de la Ville de Paris qui le remerciait du service qu’il avait rendu. Il l’accueillit, et la harangue aussi bien que la réponse furent mises au Moniteur. Enfin il se donna, avec grand soin, toutes les apparences d’une trahison qu’il n’avait pas commise et à laquelle sa présence au milieu des maréchaux ajoutait un caractère de perfidie.

Il ne lui resterait aucune preuve de la vérité du récit que je viens de faire si le hasard n’avait pas fait que, cherchant dans ses papiers, après la révolution de 1830, son aide de camp, monsieur de Guise, le même qui rédigea, en 1814, la convention antidatée avec le prince de Schwarzenberg, trouvât derrière un tiroir de secrétaire une vieille lettre toute chiffonnée. C’était celle par laquelle le général Bordesoulle lui annonçait le départ des troupes d’Essonnes, en lui demandant excuse d’avoir agi contrairement aux ordres qu’il avait donnés et lui expliquant que les appels trois fois réitérés de l’Empereur l’y avaient décidé.