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iv

Lettre de madame de Boigne à l’évêque de Nancy.


Beauregard, le 17 octobre 1805.

Personne ne veut parler, agir ni même conseiller, mon cher évêque ; il faut donc que ce soit moi qui décide ou, du moins, qui propose. Je vous envoie une lettre que je reçus l’été dernier et où nos roles à tous sont indiqués : papa se renferme dans le système de neutralité qu’il a adopté ; Rainulphe, raisonnable comme un homme de trente ans, se déclare incapable de déterminer sur une cause qu’il connaît à peine ; il s’abandonne, dit-il, à ma tendresse vraiment maternelle. Quoique je pusse aussi repousser toute décision, je calcule que ce ne serait pas la manière d’avancer une affaire aussi importante pour nous tous et sur laquelle il n’y a pas de temps à perdre. Nous avions résolu d’attendre votre arrivée ; mais elle est si incertaine et vos courses peuvent être si intéressantes que je prends le parti de vous écrire et de soumettre mes idées à votre meilleur jugement. Je commence par vous dire qu’elles sont entièrement de moi, que, moyennant cela, j’ignore si et comment elles sont praticables, que, du reste, le jeune homme est parfaitement raisonnable, qu’il sent sa position, qu’il veut, et d’une volonté ferme, la changer et qu’il est bien résigné aux désagréments de tous les genres de commencements. — Je crois que, d’après l’éducation que Rainulphe a reçue, la carrière diplomatique est celle qui s’ouvrirait pour lui avec le plus d’avantages. Il me semble que nous (c’est vous et moi), nous avons espoir qu’il serait protégé. L’ardeur d’une petite tête de dix-huit ans le pousserait à embrasser l’état militaire, mais tous les avantages