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MÉMOIRES DE MADAME DE BOIGNE

beaucoup ; ce qui m’alarme davantage est la situation d’Hambourg, la réponse laconique de Buonaparte au Sénat que j’ai lue dans la gazette de Leyde du 14 janvier : il paraît que cette ville est mal assurée et j’avoue qu’il y a beaucoup d’égoïsme à l’intérêt que je prends à sa conservation. — Adieu, mes bons amis, c’est du plus profond de mon cœur que je vous prie de penser à moi le 19 février : que cette époque me rappellera de moments heureux ! Puissé-je en passer encore dans vos bras ; car je sens bien que, pour moi, le vrai bonheur ne peut jamais être que là. — Je suis malade comme une bête depuis deux jours. Si je me laissais aller, ah ! comme J’aurais vite la maladie du pays ; mais je suis bonne fille.



Nyborg, mardi 28 janvier.

Le temps des miracles n’est pas passé : il vient de s’en opérer deux, les voici ; jugez par vous-même. Monsieur de B. a tenu pendant quatre jours à la même opinion et est à l’heure qu’il est sur le chemin de Korsör à Copenhague, car, son étoile ne l’abandonnant jamais, il a passé en quatre heures. Avais-je raison, sont-ce là des miracles, chère maman ? Quel homme ! Après avoir craint de me laisser avec vous un quart d’heure, il me campe là, dans une auberge (en Fionie, il est vrai) sous la seule garde de quelques valets dont il se méfie. Je vais maintenant, chère maman, vous mander bien des détails que je n’ai pas encore pu vous donner. Ce n’est pas qu’il lise mes lettres, mais je crains toujours que la fantaisie ne lui en prenne, et je crains de me compromettre ; c’est pour la même raison que je continue à vous recommander la plus grande circonspection. — Commençons par les