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CORRESPONDANCE

vous aurez une idée parfaite de Arundel castle. Point de parc, un potager pour pleasure ground, enfin, rien de ce qui annonce l’habitation du plus grand seigneur d’un pays. — Que vous êtes bonne, ma chère maman, de vous occuper de moi et de m’écrire aussi exactement ! Vos lettres me sont une grande consolation, car je n’aime pas cette solitude dont je ne sens nullement les charmes. Jugez ce que ce serait dans un pays où on oserait y joindre tous ceux de la pénurie ? Mais, grâce au ciel, mon devoir est rempli et ma décision est bien fixe. Je crois que peu de personnes de mon âge ont eu autant de croix à porter, mais je me roidirai contre l’adversité et je supporterai l’adversité avec le courage que vous avez droit d’attendre de moi. Je ne sais trop pourquoi tout ce bavardage, mais je suis triste et ma plume, toujours guidée par mon cœur quand c’est à vous que j’écris, ne peut se refuser à exprimer ce qu’il sent. — Nous devons changer aujourd’hui de maison. En allant hier parler à la maîtresse de celle que nous prenons, je vis plusieurs personnes à une fenêtre, qui me faisaient toutes les grâces imaginables. C’étaient mesdemoiselles North. J’arrêtai ma voiture, et j’entrai. Louisa, Elisabeth, Brownlow et Charles sont ici ; l’évêque et Lucy doivent les rejoindre aussitôt que Mrs Garnier sera confined. Si on me permet de les voir, ce sera de très agréables compagnes, d’autant plus que nous serons dès ce soir à quatre portes de chez elles. — Je n’ai point entendu parler de lady Bective ; j’imagine que le voisinage produira un rapprochement entre nous, car je ne doute pas que, si, par hasard, nous nous rencontrons, nous serons les meilleures amies du monde. Quel monde ! — Voilà votre lettre d’hier. Elle n’est pas trop intéressante ; je serais plus flattée de votre souvenir de Courli si vous ne sembliez y avoir pensé parce que vous n’aviez pas autre chose