Page:Mémoires de la société géologique de France - 1re série - 1 - 1833-1834.djvu/28

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le sol ne laisse apercevoir aucune élévation dans cette direction ; mais alors commencent les bas-fonds qui se rattachent à la pointe du golfe de Bizerta, et il serait possible qu’il existât quelque liaison entre ces deux grandes îles et la vaste échancrure qui, à partir de Tunis, fait courir du nord au sud la limite du continent africain.

Les rapports et les différences que présentent la Corse et la Sardaigne dans l’ensemble de leurs montagnes, peuvent se résumer en deux traits. La partie orientale se trouve, dans les deux îles, formée par une arête tout-à-fait analogue, courant du sud au nord, alignée suivant le même méridien, et d’une élévation à peu près semblable. La partie occidentale, qui, en Sardaigne, est occupée par une vaste plaine parsemée de collines peu importantes, est au contraire occupée, en Corse, par un énorme amas de montagnes qui sont striées suivant la direction de l’ouest-sud-ouest, et qui continueraient à former une île ou un archipel fort étendu, et d’une hauteur des à 3.000 pieds au-dessus de la mer, si toute la Sardaigne et toute la partie orientale de la Corse étaient submergées.

Les deux zones que j’ai établies dans la description de la Corse, par la seule considération de leurs caractères géographiques continuent à se trancher, à la première vue, par tous leurs autres caractères.

Les montagnes de la partie occidentale sont escarpées et sauvages, et leur nature contribue à maintenir les hommes qui les habitent dans ces habitudes de fierté et d’indépendance qui depuis la domination romaine semblent à peine adoucies. Le sol, peu favorable à la culture, leur a fait de la pauvreté une habitude antique, et la difficulté des communications les a façonnés à l’isolement, et a interdit au mouvement de la civilisation l’accès de leurs villages solitaires. Le littoral présente seul quelques points couverts d’une riche végétation et d’une population florissante.

La partie orientale de l’île est plus féconde et plus peuplée, surtout sur le versant qui aboutit à la mer. La grande plaine qui, sur une longueur de 80 kilomètres, s’étend de Bastia à l’embouchure du Fiumorbo, est recouverte par un sol en général assez fertile ; mais la fièvre pernicieuse qui, durant l’été, s’exhale des eaux stagnantes des marais, empêche la population de s’y fixer ; et la jalousie des pasteurs nomades qui y promènent toute l’année leurs vastes troupeaux, arrête les essais de défrichement, et maintient partout la végétation active, du macchi. La pente des montagnes, depuis la vallée du Golo, est occupée sur toute son étendue par une forêt séculaire de hauts châtaigniers, dans laquelle les habitans sont venus répandre leurs habitations, nourris presque sans travail par la fécondité naturelle de leurs bois, tranquilles, et payant volontiers le repos du prix de la sobriété.

La position de Bastia, dont le port est en relation assez soutenue avec ceux du continent, a contribué à introduire dans les villages voisins des pratiques