Page:Mémoires du Baron Haussmann, tome 1.djvu/256

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élections, devant toujours contenir un nombre d’électeurs proportionnel au chiffre de la population, pris dans l’ordre décroissant des impositions de toute nature payées par eux, le cens municipal descendait parfois à quelques francs, et que ce n’étaient pas les communes où le chiffre en tombait le plus bas, qui faisaient les élections les moins sages.

J’en tirais cette conséquence : que les sentiments conservateurs tenaient moins à l’importance de la possession, qu’à l’instinct défensif dont se sent animé le possesseur de quoi que ce soit ; mais, qu’il fallait aussi faire état de l’influence des conditions sociales et des habitudes prises.

À mon avis, un abaissement du cens, devant faire entrer, dans les collèges électoraux, plus de propriétaires, plus de ruraux, que de citadins, industriels et commerçants, eût relevé notablement, au lieu de les affaiblir, les forces conservatrices. Quant aux « capacités » dont l’Opposition réclamait les droits à grand bruit, c’étaient, selon moi, ce qu’on appelle aujourd’hui des « quantités négligeables », surtout, en présence des centaines de mille censitaires que je ne craignais pas de voir ajouter aux listes électorales. Quelques avocats, officiers ministériels, médecins et professeurs de plus ou de moins : la belle affaire !

Certes, il y avait loin de ce système de concessions échelonnées par périodes, à ce que nous allions voir à très bref délai : la suppression complète, absolue du cens électoral ; la dispense de toute justification sérieuse de domicile, et la réduction de la majorité politique, de 25 à 21 ans ; c’est-à-dire, en somme, l’abandon complet de toutes les garanties pouvant résulter