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M. Duffour-Dubergier, sacré Roi d’Aquitaine par les petits journaux.

Mais, l’élection simultanée du Prince Louis-Napoléon, dans les départements de la Seine, de la Charente-Inférieure, de la Sarthe et de l’Yonne ; les cris de : « Vive l’Empereur ! » proférés à cette occasion dans Paris ; les débats violents qui précédèrent son admission, prononcée à une grande majorité par l’Assemblée nationale ; enfin, sa démission, telle qu’il la motiva : tout cela fit considérablement grossir, dans nos cantons, le courant d’opinion qui commençait à s’y prononcer, en dehors de toute action du Comité, vers l’héritier de l’Empereur. Les démagogues eux-mêmes le posaient en prétendant sérieux, par la virulence de leurs attaques.

Lorsque les premières nouvelles des terribles journées de Juin parvinrent à Bordeaux, l’exaspération contre Paris n’y connut plus de bornes. Pour la troisième fois, en quatre mois à peine, Paris donnait à la France, paisible, le spectacle d’une insurrection, et, dans celle-ci, le sang coulait à flots ! On ne parlait de rien moins que de former une confédération défensive des départements du Sud-Ouest, qui fût devenue le principe d’un démembrement de la France, et la réalisation de ce fantastique Royaume d’Aquitaine, dont les mauvais plaisants avaient donné l’investiture à M. Duffour-Dubergier. On annonçait l’arrivée du Maréchal Bugeaud, que l’on calomniait, en promettant son concours à pareille aventure. Mais, pour qui savait avec quelle facilité l’opinion s’emballe à Bordeaux, il ne restait pas un moment à perdre : il fallait vite l’entrainer dans quelque autre direction.