Page:Mémoires du Baron Haussmann, tome 1.djvu/323

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ou vaisseaux de guerre en relâche dans le port, après une longue navigation. Ces marins mettent, en effet, une sorte de point d’honneur à dissiper follement, en quelques jours, le montant de leurs décomptes de solde, avant de se rembarquer, et c’est à qui leur en fournira les moyens. Eux-mêmes font de leur mieux, du reste, pour se débarrasser de leur argent. Je vois encore un matelot, un peu ému par la boisson, passer glorieusement, les mains dans ses poches, devant l’hôtel de la Croix-d’Or, où je logeais d’habitude, pour se rendre à quelque lieu de plaisir, précédé de violoneux, éméchés, comme lui.

Fort heureusement, rien de semblable ne se retrouve hors de Toulon et de sa banlieue. La population laborieuse des campagnes a des habitudes de sobriété, d’ordre et d’une économie allant presque trop loin.

La plus fructueuse culture du Var, celle de l’olivier, se pratique non seulement en plaine, mais encore, ainsi que je l’ai dit, en terrasses, sur les pentes inférieures des montagnes. Car, au delà d’une certaine altitude, l’arbre ne réussit pas : il craint le froid. On ne le rencontre donc plus dans le nord du département, où les hivers sont rigoureux. On évaluait à 55,000 hectares la superficie qu’il occupait dans les quatre arrondissements. Les huiles du Var sont comparables à celles d’Aix, et l’on en récolte de très renommées â Entrecasteaux.

Le mûrier jouissait également d’une grande faveur, à cause du prix élevé auquel sa feuille se vendait pour l’élève des vers-à-soie ; mais, comme il n’est pas moins sensible aux gelées que l’olivier même, on le cultivait