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Page:Mémoires du maréchal Joffre (1910-1917) T.1.pdf/142

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mémoires du maréchal joffre

Après un échange de vues sur les plans à suire sur les deux armées alliées, le général Gilinsky prit, le 13 juillet, l'engagement que les armées russes commenceraient l'offensive le quinzième jour par des actions d'ailes qui auraient pour objet de dégager le centre de dispositif russe. Il faut, en effet, remarquer que le tracé de la frontière russe était peu favorable à une défensive contre une attaque autrichienne débouchant de Galicie : celle-ci, débouchant du sud au nord, prenait en bout et à revers les lignes du Niémen, de la Narew, de la Pilica, de la Vistule en amont de Varsovie et du Bug. Si donc la première opération russe devait être, comme nous le demandions, dirigée offensivement vers le front Kœnigsberg-Thorn, il fallait qu'en même temps une partie des forces russes pénétrât simultanément en Galicie, afin de redresser le front, et neutraliser l'offensive que les Autrichiens entameraient vraisemblablement en partant de cette base commode.

On remarquera que la convention militaire, depuis son origine, obligeait les deux alliés « à engager à fond en toute diligence »[1] leurs forces mobilisées. Outre les raisons qui nous conduisaient logiquement à rechercher l'initiative des opérations sur notre front par une offensive aussi prompte que possible, la volonté d'être fidèles aux termes mêmes de la convention nous contraignait encore à cette même attitude. Et l'on peut affirmer que la certitude de notre volonté offensive et l'attachement aux clauses de la convention constatés par l'état-major russe dans chaque contact avec notre état-major ont fortement contribué à orienter l'état-major russe vers une intensification de son effort. S'il eût senti chez nous moins de décision, il n'y a pas de doute que nos alliés se seraient montrés plus réservés au début de la guerre.

Les accords en étaient là, lorsqu'en septembre 1912, le grand-duc Nicolas vint assister aux grandes manœuvres du Poitou. Je ne connaissais pas encore celui qui devait

  1. Paragraphe 3 de la convention militaire du 17 août 1892, citée plus haut.