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séjour en russie

être le commandant en chef des armées russes en 1914.

Né en 1856, le grand-duc Nicolas Nicolaïévitch, commandant de la garde impériale et de la circonscription militaire de Saint-Pétersbourg, était le fils du grand-ducs Nicolas Nicolaïévitch, troisième fils de l'empereur Nicolas Ier, qui avait commandé en chef les armées russes en 1877-1878 dans la guerre contre les Turcs. Physiquement, le grand-duc Nicolas était très grand, très svelte et vigoureux ; il avait dans l'armée russe la réputation d'un chef intelligent et énergique, très au courant de toutes les questions militaires connaissant et aimant son métier, et s'entraînant constamment aux lourdes fonctions qu'il aurait à remplir en temps de guerre. Beaucoup de bons esprits regrettaient que, pendant la malheureuse campagne de Mandchourie, l'empereur n'eût pas fait appel à ses services pour rétablir une situation qui n'avait jamais été désespérée. Mais on disait que le grand-duc Nicolas avait un caractère très droit, entier, indépendant, et que pour ces qualités l'empereur l'aimait et l'estimait, mais le redoutait un peu. Je ne tardais pas à me réjouir, dès mes premiers contacts avec lui, de savoir le sort des armées russes désormais entre ses mains. Les événements ont montré qu'il méritait la place éminente à laquelle l'empereur l'avait appelé. Et je m'honore d'être, depuis cette époque déjà lointaine, demeuré son ami.

Au moment de son départ, à l'issue des manœuvres, le grand-duc me demanda très aimablement de lui rendre sa visite l'année suivante et d'assister aux prochaines grandes manœuvres russes.

Le 3 août 1913, je partis pour Saint-Pétersbourg, accompagné des généraux d'Amade, Dor de Lastours, Desaleux, Hély d'Oissel, Delarue, des colonels Dumesnil et Berthelot, et du commandant Renouard.

Nous fûmes reçus de la façon la plus cordiale et la plus chaude par l'empereur et le grand-duc. Les conversations que j'eus avec ce dernier durant notre séjour de trois semaines furent nombreuses. J'en profitai pour insister auprès de lui à plusieurs reprises sur la nécessité