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la balance des forces

n'utiliseraient pas leurs unités de réserve en première ligne. « Dès lors, disait-il, à moins d'étendre dangereusement leur front et de lui donner une densité insuffisante pour une action vigoureuse, ils seraient dans l'impossibilité de dépasser la ligne de Liége-Namur. »

J'avoue qu'après mûre réflexion je me ralliai à cet avis.

Toutefois, je ne rejetai pas à priori l'hypothèse d'une manœuvre allemande plus élargie au nord de la Meuse. Mais, dans ce cas, j'étais en droite d'envisager la coopération des Belges et des Anglais.

Telle était l'idée que nous nous formions des possibilités allemandes.

Aussi bien, dans une conférence qui eut lieu aux Affaires étrangères, le 12 octobre 1912, lorsque j'eus à faire connaître qu'elle serait, en cas de conflit, d'après nos indices et nos renseignements, la situation respective des forces françaises et allemandes sur le front nord-est, il me parut possible de conclure que « dans le cas où nous ne pourrions compter sur le concours anglais, mais où il nous serait possible, par suite de la neutralité italienne, de constituer un corps d'armée avec les forces alpines et d'amener d'Algérie-Tunisie le 19e corps d'armée en Fnrace, nos forces actives seraient égales, à quelques unités près, aux forces allemandes correspondantes ; et que, dans le cas où les Britanniques se joindraient à nous, nos forces seraient nettement supérieures aux forces allemandes ». En ce qui concernait les formations de réserves allemandes, dont le nombre et la composition nous étaient très inexactement connus en raison de la transformation dont l'armée allemande était alors l'objet, je déclarai qu'il ne m'était pas possible de donner des indications susceptibles d'être rapprochées des indications similaires concernant l'armée française.

Il peut être intéressant de noter ici les chiffres que je crus pouvoir donner à l'appui de l'appréciation qu'on vient de lire. Les voici :

Nous estimions qu'en fait de forces actives, les Allemands dirigeraient contre la France de 550 à 600 batail-