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Page:Mémoires du maréchal Joffre (1910-1917) T.1.pdf/256

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mémoires du maréchal joffre

de la mobilisation : la presse tout entière y rendait hommage, même M. Clemenceau.

Du côté de l'ennemi, rien encore de net ; il ne semblait pas qu'il méditât une attaque brusquée en un point quelconque. En tout cas, nous avions en place maintenant une couverture suffisante pour nous donner le temps de prendre des dispositions, si un incident venait à se produire.

En Alsace, il ne semblait pas que le 7e corps et la 8e division de cavalerie dussent se heurter à des forces bien sérieuses. Je fixai donc au 7 au matin le début de notre offensive en Haute-Alsace. Cet ordre parut prématuré à la 1re armée ; en effet, le 6, le général Dubail me demanda de retarder cette opération, le général Bonneau commandant le 7e corps ayant exprimé des craintes au sujet de son flanc droit et de ses derrières, et faisant, en outre, état de renseignements signalant l'arrivée imminente en Alsace du XIVe corps autrichien parti, disait-on, d'Innsprück le 4 août.

Ces raisons parurent sans valeur : d'abord, toutes les reconnaissacnes d'avions rapportaient une impression de vide absolu dans toute la région de Mulhouse-Altkirch-Dannemarie, tandis que les trains signalés sur la rive droite du Rhin étaient tous dirigés vers le Nord. D'autre part les renseignements concernant le XIVe corps autrichien provenaient de Suisse où les Allemands entretenaient de nombreux agents. J'envoyai, en conséquence, l'ordre au général Dubail de ne rien modifier aux dispositions que j'avais prescrites.

Cette journée du 6 devait m'apporter d'heureuses précisions sur les projets russes. Jusque-là, nous avions seulement appris sous une forme dubitative que la Russie comptait mettre en ligne les 14 corps d'armée des circonscriptions de Vilna, Varsovie et Moscou.

Or, le 6 au matin, je reçus de M. Paléologue, notre ambassadeur à Saint-Pétersbourg, un télégramme dans lequel il me faisait connaître que le grand-duc Nicolas l'ayant reçu le 5, il avait pu insister auprès de lui sur l'urgence d'une offensive russe, le grand-duc lui avait affirmé sa résolution d'attaquer à fond sans même attendre la fin de la concentration