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Page:Mémoires du maréchal Joffre (1910-1917) T.1.pdf/444

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la poursuite après la marne

j'ai préféré courir le risque de demeurer au-dessous de la vérité, que celui de l'exagérer."

Le patriotisme de M. Millerand était trop sincère, et sa sympathie pour moi trop loyale pour qu'on puisse lui prêter ici la moindre arrière-pensée. Que, néanmoins, le ministre ait été dans la circonstance trop modeste dans l'expression de notre victoire, je ne suis pas loin de le penser. La propagande ennemie agissant avec violence couvrit la voix de la France victorieuse chez les neutres et même chez nous. Pour certains, la Marne parut comme une sorte de miracle, pour d'autres comme un hasard heureux et imprévu. Pour ceux qui prenaient leurs inspirations dans la presse ennemie, elle se réduisit même à une manœuvre du commandement allemand qui, à défaut du résultat stratégique qui lui échappait, fit valoir, à partir de ce moment, l'argument facile de la "carte de guerre".

Heureusement, le fait essentiel était là : l'ennemi était rejeté à 80 kilomètres au nord de Paris, et l'on peut dire qu'il était définitivement arrêté. On respira et l'on reprit confiance.