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la loi de trois ans

de l'indigence des effectifs ; elle ne pouvait être donnée que très difficilement dans des unités anémiées ; c'était à peine si dans les unités à effectif normal quelques hommes non gradés étaient, pendant leur deuxième année de service, journellement disponibles pour l'exercice ; et les cadres ne maniaient plus jamais les effectifs qu'ils auraient à commander en campagne.

Il devenait en outre impossible, faute de ressources en hommes, de répondre, comme le besoin s'en faisait sentir, aux créations de troupes techniques et aux besoins nouveaux révélés chaque jour par les progrès de la science et l'expérience des guerres récentes.

Enfin le Maroc absorbait une fraction notable de nos effectifs ; c'était autant de perdu pour la défense de la métropole.

Tel état l'état de la question lorsqu'en février 1913, les premiers renseignements nous parvinrent sur les nouvelles dispositions militaires qui allaient être proposées au Reichstag. Déjà, le 27 mars 1911, celui-ci avait voté une loi militaire augmentant l'effectif budgétaire de l'armée allemande de 13 000 hommes. La caractéristique essentielle de cette loi avait été un développement important des moyens techniques mis à la disposition de l'armée ; des considérations financières expliquaient la modération relative suscita d'ailleurs, à cette époque même, de violentes attaques de certains milieux politiques et de la presse militaire.

Quinze mois plus tard, une nouvelle loi militaire, dite du 14 juin 1912, votée à une majorité considérable et appliquée d'urgence, accrut d'un dixième les forces militaires de l'empire.

Et voilà que moins de huit mois après, le gouvernement allemand proposait de nouvelles augmentations qui, d'un coup, élevaient encore d'un cinquième l'effectif de paix de l'armée.

Quel était donc l'état d'esprit qui pouvait motiver de pareilles mesures à d'aussi brefs intervalles de temps ?