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Page:Mémoires inédits de l'abbé Morellet tome 1 1882.djvu/356

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de boire, de se vêtir à sa fantaisie, est une liberté de tous les jours, de tous les momens ; et je ne regarderai jamais comme libre, une nation qui sera asservie dans toutes les jouissances de la vie, puisqu’après tout c’est pour ces mêmes jouissances que les hommes se sont réunis en société.

Après s’être élevé à ces grands objets, il faut redescendre à terre et vous parler un peu de vos amis. Notre-dame d’Auteuil se porte fort bien, quoiqu’elle prenne trop souvent du café contre les ordonnances du docteur Cabanis, et qu’elle me dérobe toujours de ma portion de crème, contre toute justice. Le bull-dog, que votre petit-fils nous a amené d’Angleterre, est devenu insupportable et même méchant ; il a encore mordu l’abbé de Laroche, et nous fait entrevoir une férocité vraiment inquiétante. Nous n’avons pas encore déterminé sa maîtresse à l’envoyer au combat du taureau, ou à le faire noyer ; mais nous y travaillons. Nous avons aussi d’autres ennemis domestiques moins féroces, mais très-nuisibles ; un grand nombre de chats, qui se sont multipliés dans son bûcher et sa basse-cour par le soin qu’elle a de les nourrir très-largement ; car, comme vous l’avez si bien expliqué dans votre essai, On peopling countries, la population se proportionnant toujours aux moyens de subsistance, ils sont aujourd’hui dix-huit, et seront incessamment trente, mangeant tout ce qu’ils attrapent, ne faisant rien, que tenir leurs mains dans leurs robes