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Page:Mémoires inédits de l'abbé Morellet tome 1 1882.djvu/91

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réellement offensé dans d’autres endroits de ses feuilles. J’ai été encore plus fâché de voir que le chagrin que lui causent les brochures l’ait aveuglé au point de ne pas sentir combien il est indiscret, et, j’ose le dire, déraisonnable, de demander froidement justice de Fréron dans le moment où le septième tome de l’Encyclopédie, et surtout l’article Genève, ont excité les cris les plus puissans, et où on ne peut soutenir l’ouvrage et prendre le parti des auteurs qu’en s’exposant personnellement à des reproches très-graves.

Pour ce qui me regarde, vous savez que, pendant bien des années, je me suis occupé uniquement de littérature, et je n’ai vécu qu’avec des gens de lettres. Quand je me suis trouvé entraîné par des circonstances imprévues, et peut-être contre mon gré, dans une sphère différente, je n’ai rien tant désiré que de pouvoir rendre quelques services à ceux avec qui j’avais passé ma vie. J’ai cru en trouver l’occasion lorsque j’ai été chargé de la librairie, puisque je me trouvais à portée de leur procurer la liberté d’écrire, après laquelle je les avais toujours vus soupirer, et de les affranchir de beaucoup de gênes sous lesquelles ils paraissaient gémir, et dont ils se plaignaient continuellement. Je croyais aussi rendre un service à l’état, parce que cette liberté m’a toujours paru avoir beaucoup plus d’avantages que d’inconvéniens.