Page:Mémoires secrets d’un tailleur pour dames, 1880.djvu/164

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 154 —


ne sont pas désarmées… au contraire.

En écoutant sa nouvelle maîtresse, l’amant heureux laissa s’arrêter son regard sur un buste qui se carrait sur une console en bois doré.

— Mais qu’est-ce que cela, dit-il, tout à coup en désignant l’objet du doigt.

— Ça, reprit Anna, en grimaçant une lippe dédaigneuse, c’est un protecteur.

— Ton… Monsieur M… l’ambassadeur !

— Précisément.

— Mais c’est mon oncle.

— Ton oncle !… Ah ! pauvre ami, continua la jeune folle, en se sentant désopilée par un accès nouveau d’hilarité. Ah ! pauvre ami ! j’aurais dû m’en douter en te voyant entrer chez moi, sous les auspices que tu avais choisis !

Quoiqu’il en soit, la jeunesse aidant, nos amoureux se revirent tous les jours ; pendant une quinzaine ils s’aimèrent, ils s’aimèrent !… Le buste seul du général aurait pu dire à quel point ils s’aimèrent pendant cette bienheureuse quinzaine. Rien, pendant cette période, ne troubla leur bonheur, ni leur sécurité. Le vicomte venait voir la belle enfant, dans le milieu du jour, à une heure où les rencontres alarmantes n’étaient point