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La coquette tendit ses lèvres à son amant qui la pressa contre son cœur en oubliant dans cette douce étreinte le reste du monde.

Les heures s’écoulent vîte entre deux amoureux, aussi Emmanuel trouvait-il que Marie, qui pourtant venait passer quelques heures tous les jours près de lui, était bien avare de son temps.

C’est qu’il ne remarquait pas, que parfois de légers bâillements venaient contracter la jolie bouche de sa maîtresse et qu’elle cherchait mille prétextes pour partir plus vîte.

Un jour qu’elle regardait le plafond avec une fixité qui n’était pas flatteuse pour notre jeune amoureux, d’une pièce à côté, le son d’un piano se fit entendre, l’artiste jouait le Miserere du Trovatore. — Mariette se leva, mue comme par un ressort, et se dégageant des bras d’Emmanuel ;

— Qui joue-là ? demanda-t-elle.

— Je ne sais, un voisin, sans doute, mais reviens près de moi, ma bien aimée.

— Tout à l’heure, dit-elle d’un ton bref, taisez-vous.

Puis d’une voix de contralto pleine et sonore, elle entonna le chant de Léonore, avec le talent d’une artiste consommée.

Le jeune homme ébahi la contemplait.