Page:Mémoires secrets d’un tailleur pour dames, 1880.djvu/77

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 67 —


allé faire un voyage pour ses denrées coloniales, elle prit courageusement son parti, dit adieu à son bel Hassan, alla demander la tendre bénédiction de M. le curé, retira sa fille de pension, puis, accompagnée de son mari, tout fier d’être enfin seul avec sa femme, partit pour la Bretagne.

Arrivés dans leur terre, il fallut se mettre en quête d’un mari.

— Les provinciaux sont des imbéciles, se disait-elle ; — oui ! mais là comme ailleurs on ne veut pas de femme sans dot.

Le mariage n’est-il pas une prostitution constante ? Deux dots, deux positions qui s’accouplent, et non pas deux êtres qui s’aiment et ne font qu’un.

Elle s’était si souvent vue ne faire qu’un, la baronne !

Enfin, après avoir appelé son mari qui commençait à regretter Don José — et ses bons dîners, — elle l’envoya voir différents voisins pour les inviter au château. Mais cela fut inutile ; pas un parti possible pour Laure, qui était une grande fille simple, sans coquetterie, à qui cela était bien égal de se marier avec n’importe quel hobereau, pourvu qu’on ne la tourmentât pas pour s’habiller et aller dans le monde.