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verait la gloire d’Israël et deviendrait le juge des nations. C’est sous cette forme, conciliable avec la rigueur du Monothéisme, que le dogme de la résurrection, du jugement dernier et de la vie future pénétra chez les Juifs et prit place ensuite dans la religion des Chrétiens et dans celle des Musulmans.

Le Panthéisme égyptien et le Panthéisme indien diffèrent l’un de l’autre comme deux espèces d’un même genre. Moins astronomique que la religion égyptienne, le Brahmanisme ne s’occupe pas du retour des périodes régulières dans la nature ; étranger à la notion du temps, il ne voit que les transformations indéfinies de l’être universel. Il admet la métempsycose, mais non la résurrection des corps ; l’âme purifiée par les vertus ascétiques remonte l’échelle des transmigrations et arrive enfin à la suprême béatitude en s’absorbant dans l’infini. Le Bouddhisme adopta le dogme des métempsycoses, en offrant aux âmes qui s’affranchissent du désir l’espoir d’échapper au fardeau des renaissances et d’entrer dans le Nirvâna, dans la paix divine de l’éternel sommeil.

Le Bouddhisme aurait pu se développer dans l’Inde s’il n’avait sapé l’ordre social, tel que l’entendaient les Brahmanes, en remplaçant le sacerdoce héréditaire par un clergé monacal recruté dans toutes les castes. Son expulsion doit être attribuée à cette cause purement politique et non à une différence de doctrine, car l’Athéisme bouddhique n’est qu’une variante du Panthéisme et il est bien difficile de saisir la nuance qui sépare l’être absolu du non être, et de distinguer l’anéantissement de l’âme de son absorption dans le grand tout. On peut s’étonner de voir l’esprit religieux des Orientaux les conduire à une conclusion si opposée en apparence à cet espoir d’une vie future qui est la principale force de la religion en Occident ; pourtant, si l’on s’en tient au dogme officiel, sans tenir compte du sentiment populaire, qui regarde les morts comme des amis toujours présents, on est obligé de convenir que la béatitude inactive promise aux élus après le jugement dernier ressemble singulièrement au Nirvâna.


Solution hellénique du problème de la mort.


La croyance à l’immortalité individuelle, en dehors de toute idée de résurrection ou de transmigration, appartient en propre au Polythéisme, qui rattache l’univers à des principes multiples et le considère comme un ensemble de forces distinctes, irréductibles, réagissant les unes sur les autres. Le culte des morts se trouve en germe dans le Véda, où l’on voit des prières et des offrandes adressées aux ancêtres ; on le retrouve dans toutes les branches de la race indo-européenne : les religions de famille ont fait la force du patriciat romain pendant la république. Mais c’est l’Hellénisme qui a donné au dogme de l’immortalité de l’âme sa forme la plus complète ; aucune religion ne l’a affirmé si haut ni si clairement.

Le nom que les Grecs donnaient à l’univers, ϰόσμος, signifie ordre et beauté ; le monde est une république parfaite, où la loi est toujours ob-