Page:Ménard - Catéchisme religieux des libres-penseurs, 1875.djvu/7

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 6 —

cette conception religieuse devait se subordonner à son aspect moral dans une religion de seconde formation ; le Dualisme iranien est en effet une réforme que la tradition a rattachée au nom de Zoroastre et qui sert de passage entre les religions antiques et les religions modernes. Le Monothéisme hébraïque pouvait, sans renoncer à son principe, faire des emprunts au Dualisme ; la doctrine mazdéenne du Diable et des hiérarchies céleste et infernale, quoique étrangère à la Bible, finit par s’infiltrer chez les Juifs, et c’est par leur intermédiaire qu’elle a passé dans la religion des chrétiens et dans celle des musulmans.


Religions modernes.


Après s’être répandue sur le monde extérieur, l’intelligence se replie sur elle-même ; à la religion de la nature succède la religion de l’humanité représentée par le Bouddhisme en Orient, par le Christianisme en Occident. L’homme trouve la plus haute expression du divin dans le triomphe de l’âme sur les attractions du dehors ou dans le sacrifice de soi-même pour le salut de tous.

Le dogme unitaire de la vie universelle s’était produit sous la forme la plus absolue dans l’Inde brahmanique : c’est de là que devait sortir la plus énergique protestation, car la pensée humaine oscille comme le pendule, et la réaction est proportionnelle à l’intensité de l’action. De la religion du Grand Tout sort la religion du Vide ; au sommet de l’échelle de la vie et des métamorphoses, le Bouddhisme place le Néant comme le dernier terme de la béatitude et la suprême espérance de la vertu. Chassé de l’Inde qui avait été son berceau, le Bouddhisme s’est étendu par une propagande pacifique sur le Thibet, l’Indo-Chine, la Tartarie, la Chine et le Japon ; c’est la religion qui compte aujourd’hui le plus de sectateurs.

Le Christianisme n’est pas sorti comme le Bouddhisme d’une source unique, mais d’un compromis entre l’Hellénisme et le Judaïsme déjà transformés, l’un par la philosophie, l’autre par des religions étrangères. À côté du Monothéisme juif se place le grand symbole de l’Homme-Dieu qui résume tout l’anthropomorphisme grec. Au principe de l’ordre universel est associée, dans l’unité du divin, la loi morale sous la forme la plus haute, la rédemption par la douleur. Autour du Rédempteur, type idéal du sacrifice de soi-même, se déroule, dans le ciel bleu de la conscience, la chaîne lumineuse des vertus vivantes, la pureté des vierges et l’héroïsme des martyrs. La transformation des mœurs sous l’influence de la philosophie explique la préférence accordée en général aux vertus ascétiques sur les vertus actives, quoique cette préférence soit moins exclusive chez les chrétiens que chez les bouddhistes.

La nature n’est pas réduite par le Christianisme à une pure illusion, comme dans le Bouddhisme, mais le Prince de ce monde en a fait le théâtre de son action malfaisante, et quoique la création soit une œuvre divine, le royaume du Christ n’est pas de ce monde ; il est roi du monde