Page:Ménard - Du polythéisme hellénique, 1863.djvu/323

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ne meure point. » La vie nous est prêtée, mais en deçà comme au delà règne la nuit impénétrable ; les passages sont gardés ; la naissance et la mort sont le secret des dieux. Il y a certainement quelque chose de sacré dans les contradictions qui planent autour des deux portes de la vie ; on se découvre devant un cercueil et on fait le contact d’un cadavre ; mélange de respect et de dégoût, représenté par le Styx, redoutable témoin des serments des dieux. Si la mort est enveloppée d’une horreur mystérieuse, l’acte non moins mystérieux de la génération se couvre chez tous les peuples des voiles instinctifs de la pudeur. Pourquoi ces rougeurs involontaires s’il y a là une loi divine ? Elle est la base de la famille, le chaîne sainte de la communion des êtres et on n’ose pas en parler. C’est que la pudeur est la couronne des chastes déesses, l’auréole de la vierge mère ; il faut laisser à chaque dieu son empire : la lumière souillerait ce qui appartient à la nuit.

Les mystères semblent s’être développés plus tard que les autres formes de la religion grecque. Déméter et Perséphone sont quelquefois nommées dans l’ Iliade et dans l'Odyssée, mais sans qu’il y soit question du caractère secret de leur culte. Le silence d’Hésiode étonne encore davantage, puisqu’un de ses poèmes a pour sujet l’agriculture, et que le pays où il vivait, la Béotie était le séjour de ces populations thraces d’où les légendes font sortir Eumolpe et Orphée. Il est vrai, qu’il y a vers la fin des Travaux un vers où on peut voir unes allusion aux mystères : « Si tu te trouves au