Page:Ménard - Poèmes et Rèveries d’un paien mistique, 1895.djvu/192

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O plus heureux que nous ! vous ne pouvez entendre
La calomnie hurlant autour de vos tombeaux,
Sans qu’il se lève un seul ami pour vous défendre
Et rejeter l’injure au front de vos bourreaux.

Vous quittez avant nous une terre maudite
Où Dieu même est toujours du parti du plus fort,
Où le pauvre est esclave, où sa race est proscrite,
Où la faim n’eût jamais qu’un remède, la mort.

Lorsque vous nous tendiez, au plus fondes batailles,
Votre arme vengeresse échappée à vos bras,
Nous vous avions promis de justes représailles,
Et nos bras enchaînés ne vous vengeront pas.

Vous ignoriez le sort qu’ils gardaient à vos frères,
L’ivresse des vainqueurs, leurs rires insultants,
Et la sanglante orgie, et les froides colères ;
Frères, dormez en paix : vous êtes morts à temps.