Page:Ménard - Rêveries d’un païen mystique, 1911.djvu/114

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tre elle, contre lui-même, et surtout contre l’autre, qu’il aurait voulu broyer.

Il vit bien qu’il était puni pour son orgueil : je me croyais bien fort, à l’abri des tempêtes. Avec quelle pitié dédaigneuse je regardais du rivage ceux qui sont encore ballottés par le flot troublé de la vie ! Et maintenant ! — Eh bien, quoi ? C’est fini, maintenant ; le mauvais rêve est évanoui ; me voici rentré dans le calme et la paix. Elle m’a jeté ce nom d’Éros, qui n’est plus le mien, comme si elle voulait ranimer une flamme éteinte, mais il y a longtemps que j’ai tué le désir. J’ai mon âme à sauver. Que me fait l’âme de cette Naïade ? Si elle l’a perdue, qu’elle la redemande à celui qui l’a prise, et qu’elle en fasse ce qu’elle voudra. Qui l’empêche de faire son salut, en se retirant au désert ? Et d’ailleurs que m’importe ? Je n’y pense même plus, et je rougis d’y avoir pensé.

Il était rentré dans sa cellule, et il essayait d’évoquer l’image d’Hypatie. Il se rappelait sa chaste beauté, inondant les âmes d’une paix divine. C’était un lac tranquille et bleu, qui réfléchissait le ciel. Mais l’autre, la Nymphe, oh ! Ce regard humide et sombre, qu’on ne peut pas