Page:Ménard - Rêveries d’un païen mystique, 1911.djvu/168

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ment nécessaire d’une dette ancienne, contractée dans des existences antérieures. Cependant, ô démon, pour qu’un châtiment soit juste, ne faut-il pas qu’il soit compris par celui qui le supporte ? Les voies de votre justice restent bien obscures, si chaque fois que nous rentrons dans la naissance nous perdons la mémoire qui nous rattachait au passé.

Le Dieu. Ainsi, c’est la mémoire que tu regrettes ? Prends garde : remonte la chaîne de tes souvenirs. Ce n’est pas une confession que je te demande, et tu n’as pas à t’excuser comme devant un juge ; la conscience humaine n’a pas à chercher d’autre juge qu’elle-même : elle n’en saurait trouver de plus sévère et de plus clairvoyant. Je sais que tu n’es ni des plus mauvais ni des meilleurs ; mais souviens-toi : n’y a-t-il pas un jour, une heure, que tu voudrais retrancher de ta vie ? Cette heure, nous pouvons l’effacer de ta mémoire, mais aucun Dieu ne peut faire que ce qui a été n’ait pas été. L’homme demande à ses religions des eaux lustrales pour laver les souillures ; mais, si le repentir efface la faute, peut-il étendre le pardon à d’autres âmes qu’un mauvais exemple a perverties et qui,