allures équivoques et aux faux cols douteux. Ils s’affirmaient défenseurs du trône et de l’autel. Ils s’étiquetaient Camelots du Roi. Ils comptaient, en effet, parmi les fidèles de Charles Maurras, le filandreux. Pour l’instant, et en attendant le retour, qu’ils jugeaient au fond improbable, de l’affectionné Philippe, chacun d’eux dégustait lentement, au grand mécontentement du patron du lieu, le même et éternel quart de bière du Lion, lequel témoignait, depuis dix heures du soir, de l’extrême sobriété de ces peu désirables clients. Ces messieurs — jeunes étudiants qui n’étudiaient pas grand-chose, fils d’aristocrates dans la débine, auxquels se mêlaient volontiers, et avec leur consentement, quelques apprentis bouchers, quelques garçons pâtissiers et une demi-douzaine d’ouvriers discutables — nageaient dans une irrémédiable purée.
L’un de ces champions de la patrie et de la tradition avait su rapidement atteindre, tant au Quartier Latin qu’à Montmartre, à une véritable célébrité. Condamné à quelques jours de prison à la suite de manifestations plus bruyantes que dangereuses, le jeune Rabourdin, aide-pâtissier de son état et fils de pâtissier, avait connu la gloire d’être cité au tableau d’honneur de l’organe royaliste.
Depuis, il sévissait sans nulle modestie, dans toutes les boîtes de nuit et sur le trottoir du Boul’‑Mich. J’ai déjà eu l’occasion de le signaler et de noter qu’il était encore plus abominablement sourd que son chef de file, le théoricien des Martigues. Aussi, l’on n’entendait que lui. Il frappait du poing sur les